The Fearless Vampire Killers, Le Bal des Vampires, de Roman Polanski (1966).


Pas facile de parler de The Fearless Vampire Killers (1967; or Pardon Me But Your Teeth Are In My Neck): son réalisateur est depuis longtemps décrié à la suite de ses exactions.

J'ai grandi avec ce film. Comédie "physique" facétieuse, parodie bien sentie de la Hammer, mon introduction au cinéma de genre horrifique, il y a, sans mauvais jeu de mots (les Carpates enneigées), quelque chose de glaçant dans la violence sourde du film. 

Dans cette œuvre familiale (se réunir pour s'en payer une bonne tranche), mais familiale aussi parce que mise en images d'abus d'un père sur sa fille, des hommes sur les autres, Polanski filme sa compagne dans la vie, la magnifique Sharon Tate, où son regard amoureux le dispute à sa disparition sur et hors de l'écran. 

Encore aujourd'hui terrorisante (la "pénétration" du Comte dans le bain, puis dans le cou de la protagoniste), cette scène en apparence banale, atteste symboliquement pour moi de la culture du viol. Cela a résonné et opère encore pour moi comme le miroir d'un trauma vécu. L'hémoglobine, jouissive dans les néo-slashers que je regardais à la même époque, la pâleur cadavérique des visages des vampires, et ce bossu dégueulasse, me tétanisaient par le contraste entre vie et mort dont ils se faisaient l'écho.

L'éponyme bal des vampires, scène ambigüe de danse comico-malaisante, participe de ce ressenti qu'un revisionnage à l'âge adulte n'efface pas. La référence à Bosch, longtemps ignorée, confirme que si ce film m'effraye, bien qu'une poilade, c'est par son illustration d'une forme de fin du monde encore non-exorcisée depuis ma petite enfance.

La musique, ses chants féminins, complaintes qui balisent le parcours initiatique d'Alfred, auxquelles s'ajoute cet érotisme queer latent propre aux récits vampiriques, me hantent, jusqu'à la scène finale absolument premier degré où la menace d'une oblitération de toute humanité se confirme.

Le Bal des Vampires de Polanski, pas un chef d'œuvre mais une excentrie sur le "grooming", pose, dans un geste involontaire, des questions contemporaines et sur son auteur. C'est en ça que je le trouve intéressant.

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