C'est Arrivé Près de Chez Vous, de Rémy Belvaux, André Bonzel et Benoît Poelvoorde (1992).


“Cinéma, je t'ai donné mon existence."

Cette comédie noire, expérimentale, en N & B, aussi fauxcumentaire, suit une équipe qui enregistre sur pellicule la vie d'un serial-killer à la petite semaine.

Le quatrième mur, brisé, permet un mélange d'humour grotesque (le vigil noir ; les pintages de gueules ; les récitations prétentieuses de poèmes ; les logorrhées pseudo-sociologiques) et de réalisme (comme Striptease, “l’émission qui vous déshabille”). Lorsque le personnage de Ben, impérial, n’étrangle ou ne flingue pas, sa verve, terrifiante mais attachante, la permissivité accordée par ses complices confèrent aux homicides, filmée de près comme de loin, une teneur abrasive choquante. Un chouiya Hooperien et Kubrickien, CAPDCV est outrancier mais contrebalancé par des scénettes du quotidien (la vraie famille de Poelvoorde dans leur propre rôle ; la banalité du rythme journalier fait de trajets en voiture, de repas, d’ “afterwork”).

“Alors que le fléau de notre société, et tout le monde s’accorde à le dire, est la violence, ils vont te foutre des briques rouges.”

Documenteur et found-footage avant l'heure, dépassant toute morale sans recours musical, une réflexion sur l’impact de la violence (à la TV et IRL) poussée à son paroxysme, entre Peeping Tom et Henry: Portrait of a Serial Killer, CAPDCV, à ne surtout pas prendre au premier degré, est à déguster comme un caractère à la La Bruyère. Pour preuve: Ben s'amuse de son propre acte cinématographique, se comparant à Philippe Noiret, dont le personnage dans Le Vieux Fusil défonce le crâne d'un Nazi ; dans la salle de montage, l'équipe visionne un rush où Ben se fait maraver et où Ben fait porter la responsabilité de cet échec aux personnes mêmes qui lui permettent d’exister au monde. 

Entre objet d’étude (considéré de l'extérieur) et sujet (personne active qui nous donne à voir toute son intimité sordide), CAPDCV propose sur notre société du spectacle et de la goinfrerie constante, un regard divertissant satirique autant qu'il est traumatisant, glaçant et effroyable.

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